Chloe échoue à faire condamner Mango pour contrefaçon d'un modèle de sac.

L’arrêt de la Cour d'appel de Paris du 22 juin 2021 est intéressant en ce qu'il reconnaît l'originalité d'un modèle de sac sur la base d'un élément qui n'était pas invoqué en première instance, tout en refusant de considérer que des actes de contrefaçon ont été commis en l'espèce.

L'affaire opposait à la société Chloe à la société Mango. La première a conçu et commercialise un sac à main intitulé "Faye", d'inspiration "Seventies", mis en vente en 2015. La seconde a commencé à commercialiser en 2016 un modèle de sac décliné en deux couleurs et intitulé respectivement "Nina" et "Leopard". 

Chloe a estimé que le modèle de sac de Mango constituait la contrefaçon de son modèle "Faye" et a donc assigné cette dernière à la fois pour contrefaçon d'un modèle communautaire non enregistré et pour contrefaçon de droit d'auteur

En première instance, le Tribunal judiciaire de Paris a refusé de faire droit aux demandes de Chloe, estimant que, si le sac bénéficiait bien de la protection accordé aux modèles non enregistrés, en revanche le sac n'était pas suffisamment original pour bénéficier de la protection du droit d'auteur et qu'en tout état de cause le modèle "Nina" et "Leopard" ne présentaient pas suffisamment de ressemblances pour être contrefaisants.

En appel, s'agissant de l'originalité, Chloe a légèrement modifié son argumentation puisque, désormais, l'appelante évoquait une caractéristique passée précédemment sous silence, en l'occurrence une chaîne reliant l'anneau central du sac à la partie droite et haute du sac. Et, selon la Cour, si "la combinaison d'un sac à main avec un anneau central prééminent était déjà présente" sur différents modèles antérieurs, en revanche "la chaîne métallique dorée reliant l'extrémité droite du sac à l'anneau, attachée par un mousqueton", associée aux autres caractéristiques du modèle, permettait de conférer l'originalité nécessaire pour bénéficier de la protection par le droit d'auteur.

Deux enseignements s'imposent donc : l'originalité peut se loger dans un détail ; et il est possible de revendiquer en appel certaines caractéristiques qui, pour une raison ou une autre, n'avaient pas été évoquées en première instance.

Las pour Chloe, l'originalité en cause ne lui a pas permis de remporter son appel. En effet, tant en ce qui concerne la contrefaçon de droit d'auteur que la contrefaçon de modèle non enregistré, la Cour a estimé que le sac de Mango ne constituait pas la copie du sac "Faye".

Et, sur le plan du droit d'auteur, l'arrêt repose essentiellement sur la non reprise par le sac de Mango de la caractéristique originale du sac de Chloe : en effet, le sac de Mango ne comporte pas la fameuse chaîne métallique qui confère toute son originalité au modèle "Faye" ! L'on comprend d'ailleurs mieux pourquoi cette caractéristique n'avait pas été évoquée en première instance. 

L'arrêt a donc permis à Chloe de rectifier le jugement en retenant l'originalité du sac "Faye", mais n'a pas permis d'interdire à Mango de commercialiser son propre modèle.